Le catharisme
en bref
Dès l’an mille on repère à travers toute l’Europe un vaste mouvement d’anticléricalisme populaire à l’encontre de la hiérarchie catholique qui va se structurer en une véritable contre-église capable de concurrencer l’autorité de Rome. Inculpés d’hérésie et persécutés, les cathares comme les appelaient leurs détracteurs, revendiquaient un retour à la simplicité des premières heures du christianisme.
Ils menaient une vie ascétique, renonçant aux biens matériels. Respectueux de toute forme de vie, ils s’abstenaient de nourriture animale. Vivant dans des maisons communautaires, les officiants appelés Bons hommes et Bonnes dames tentaient de soulager la misère humaine, prêchant le salut en Jésus-Christ et conférant le seul sacrement admis, le consolementum, le baptême par imposition des mains. La concordance entre leurs prêches basés sur l’évangile et leurs actes du quotidien, leur valut une telle popularité, qu’au milieu du XIIe siècle on dénombrait 800 églises cathares en France.
Le Languedoc fut le principal terroir du catharisme qui s’appuyait sur les seigneurs occitans réceptifs à ce renouveau spirituel. Mais le pape Innocent III, plus que jamais désireux d’étouffer l’hérésie, lance la croisade contre les Albigeois menée par Simon de Montfort et les barons français du Nord. En juillet 1209 le massacre de Béziers marque le début de l’holocauste cathare. Afin d’éradiquer les dernières poches de dissidence, l’Inquisition fut instaurée par le pape Grégoire IX, en 1233. Un peu moins d’un siècle plus tard Guilhem Belibaste, le dernier cathare, était mené au bucher à Villerouge-Termenès (Aude, non loin de Rouffiac-des-Corbières).
Trois siècles de catharisme et de persécutions
(pour les férus d’histoire)
Dès l’an mille on repère à travers toute l’Europe un vaste mouvement d’anticléricalisme populaire qui va se structurer en une véritable contre-église capable de concurrencer l’Eglise de Rome. Suivant les régions, ces communautés chrétiennes ne sont pas toutes homogènes. Le bogomilisme, largement répandu en Bulgarie et dans l’empire byzantin, influence beaucoup le catharisme en Pays occitan.
Considérés comme hérétiques, ces dissidents furent rapidement condamnés et pourchassés par l’autorité religieuse. Des documents de l’époque font mention du premier bûcher à Orléans en 1022 : «…Jugés trop pieux pour être honnêtes, 12 chanoines d’Orléans sont brûlés : ils s’imposaient chasteté, jeûne, végétarisme, menaient une vie ascétique et dénonçaient le sacrement de mariage… ». Ce bûcher marque le début de la répression sanglante.
C’est seulement plus tard en Allemagne que le terme ‘cathare’ sera créé pour désigner l’ensemble des hérétiques. Plusieurs étymologies sont avancées avec des sens différents : Du grec catharos qui veut dire ‘pur’ ou encore kataroos, soit en français catarrhe, écoulement, dans le sens de suintement de la doctrine hérétique.
En fait les cathares eux-mêmes se considéraient tout simplement comme chrétiens, se présentant comme détenteurs de l’Eglise véritable du Christ, héritiers des préceptes de Jésus et des apôtres, consignés dans les premières écritures. Ils réfutaient l’autorité du pape, l’ensemble des sacrements à l’exception du baptême et ne reconnaissaient pas le Dieu vengeur de l'Ancien testament.
Peu hiérarchisée, cette église empreinte de la simplicité des premières heures du christianisme comportait trois niveaux : les auditeurs, les croyants et les élus qu’on appelait ‘bons hommes’, ‘bons chrétiens’ ou encore ‘parfaits’. Au dessus d’eux il y avait les évêques. Le ministère était ouvert aux femmes, les ‘bonnes dames’ ou ‘bonnes chrétiennes’. Ils menaient une vie ascétique, renonçant aux biens matériels. Respectueux de toute forme de vie, ils s’abstenaient de nourriture animale. S’ils pratiquaient la chasteté, les simples croyants avaient par contre toute liberté de pratiquer l’union libre et de fonder des familles (refus du sacrement du mariage). Vivant dans des maisons communautaires au cœur des agglomérations, les ‘bons hommes’ et les ‘bonnes dames’ tentaient de soulager la misère humaine, prêchant le salut en Jésus-Christ et conférant le seul sacrement accepté, le baptême par l’imposition des mains, le consolementum. La concordance entre leurs prêches basés sur l’évangile et leurs actes du quotidien, leur valut une telle popularité, qu’au milieu du XIIe siècle on dénombrait 800 églises cathares en France.
La première grande campagne de prédication antihérétique en Languedoc date de cette époque. Elle est conduite par l’abbé Bernard de Clervaux (futur Saint Bernard). En véritable ‘gendarme’ spirituel de la chrétienté, il prêche à Toulouse et à Albi, mais rien n’y fait ! Plus tard, Dominique de Guzman, issus d’un ordre mendiant prendra la relève des cisterciens pour ramener les hérétiques sur le droit chemin, sans plus de succès.
En dépit des buchers qui déciment les cathares dans le Nord de l’Europe, le catharisme continue à s’étendre au grand jour dans le Sud de la France, avec la bénédiction de certains seigneurs locaux. En 1167, l’assemblée de Saint Félix de Caraman en Lauragais, présidée par l’évêque bogomile Nicétas de Constantinople crée quatre évêchés occitans. A la fin du XIIe siècle le catharisme touche à son apogée.
Un moine cistercien, Pierre de Castelnau est envoyé par le pape Innocent III pour lutter une nouvelle fois contre l'hérésie. Mais Raymond VI, comte de Toulouse refuse de collaborer avec le légat. Il est excommunié et l'interdit est jeté sur son comté. L'assassinat du moine Castelnau par un écuyer du comte, provoque la colère du pape Innocent III qui, résolu d’en finir avec les cathares, lance la croisade contre les Albigeois menée par Simon de Montfort (1209-1224).
Avec l’assentiment du roi de France, barons et chevaliers du Nord voyaient dans ces croisades un excellent prétexte pour soumettre les seigneurs du Sud et s’approprier leurs biens. Ils furent le bras et l’épée de la répression. Mais c’est à l’Eglise catholique romaine que revient en final la responsabilité de l’holocauste cathare, pour avoir réagi avec une férocité extrême face à une conception spirituelle remettant en question sa puissance temporelle et son hégémonie sur les âmes.
Mais revenons à Raymond VI de Toulouse qui décidé de regagner les bonnes grâces du pape, se repent publiquement et rejoint la croisade. En juillet 1209 les croisés prennent la ville de Béziers dont les habitants sont massacrés. Le seigneur des lieux, le vicomte Raimond Roger Trencavel se replie dans sa forteresse carcassonnaise, mais capitule après quatorze jours de siège, abandonnant l'ensemble de ses possessions à Simon de Montfort. Une seconde croisade est conduite par le prince Louis de France qui aboutit au siège de Marmande. Cinq mille habitants périssent et la ville est incendiée. De nombreuses autres ‘castrums’ cathares (ensemble d’habitations fortifiées) : Termes, Minerve, Montségur subiront le même sort. Les faydits, ces chevaliers et seigneurs languedociens dépossédés de leurs fiefs rejoignent le maquis, organisant la résistance contre les croisés. Soit ils étaient eux-mêmes croyants cathare et donc coupables d'hérésie, soit ils refusaient de prêter allégeance et devenaient protecteurs des hérétiques (Certains d’entre eux comptaient des parfaits et parfaites au sein même de leur famille). Afin d’éradiquer les dernières poches de dissidence cathare, l’Inquisition est instaurée par le pape Grégoire IX, en 1233. Les derniers cathares rentrent dans la clandestinité. Les hérétiques repentants sont obligés d’exhiber sur leurs vêtements la croix latine jaune en signe d’infamie et risquent le bucher au moindre faux pas. D’autres se réfugient en Catalogne ou en Haut pays valencien auprès de la diaspora occitane. Ce fut le cas de Guilhem Belibaste. Un jour de 1321, il décide de revenir au pays, mais il est dénoncé par un de ses pairs, emprisonné et condamné au bucher par l’inquisiteur de Carcassonne. Un peu moins d’un siècle après le début de l’inquisition, le dernier ‘bon homme’ entamait son ultime voyage par le feu à Villerouge-Termenès.
Quelques bons ouvrages sur le catharisme :
De A. Bernon – Directrice du centre d’études cathares René Nelli à Carcassonne (1982-1998)
‘Le vrai visage du catharisme’ Portet-sur-Garonne, Loubatières, 1989
‘Les femmes cathares’ Paris, Perrin, 1992
‘Les cathares, vie et mort d’une Eglise chrétienne’ Paris, J. Grancher, 1996
‘L’épopée cathare’ en 6 tomes (4 tomes, Toulouse, Privat, 71-89 - 2 tomes, Paris, Perrin, 1998)
De J. Berlioz – ‘Le Pays cathare. Les religions médiévales et leurs expressions méridionales. Paris, Ed. du Seuil, 2000 (Points d’histoire, 279)
‘Le concile cathare de Saint-Félix a-t-il eu lieu ? 1999 (L’histoire, 231)